Je pense que c’est un problème de cycle. Nous sommes dans une période de fin de cycle où nous avons vécu avec la chute du Mur de Berlin et La Baule, de transition démocratique correcte. Après, il y a eu quand même le basculement sécuritaire sur le plan géopolitique mondial avec les attaques du World Trade Center -et quand même- le problème du jihadisme qui nous a envahi… Tout cela fait effectivement que les pouvoirs se sont crispés. Et les organes de régulation –que ce soit la Cédéao, que ce soit l’Union africaine et aussi l’UE– se sont affaiblis, y compris les Nations unies. Parce qu’effectivement il y a l’émergence de pays qui aujourd’hui collaborent avec les pays africains – que ce soit la Chine, que ce soit la Turquie ou la Russie – qui ne sont pas regardants sur les questions des droits de l’homme. Alors l’Europe se dit : Mais tiens ! Ils sont en train de prendre tous les marchés, maintenant nous allons fermer les yeux.
Le déclin international du multilatéralisme fait que les modèles autocratiques séduisent toujours davantage…
Nous sommes dans une situation où, c’est sur le plan endogène que le réveil doit se faire. On ne peut pas compter sur l’extérieur, aujourd’hui, pour dire : nous allons améliorer la situation en Afrique. Il est évident que les gens -les putschistes- vont avancer ! Je pense que, s’il n’y avait pas eu de putsch au Mali, il n’y aurait pas eu de putsch au Tchad ni de putsch en Guinée. Donc il faut faire extrêmement attention. Comme on dit, la contamination est vraiment possible dans certains pays qui vont persister à l’autoritarisme, à se crisper, à garder le pouvoir, à ne pas respecter les limitations de mandat… Soit, c’est le putsch, soit, c’est les insurrections. C’est inévitable !
Il y a des situations particulières qui vont inquiètent ?
Il y a des situations aussi d’incertitude, où les gens ne sont, ni pour la limitation de mandat, etc., qui lorgnent aussi le troisième mandat, surtout dans des pays comme le Sénégal. Tout cela, ce sont des situations qui inquiètent. Mais il me semble qu’il faut que l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest -le leadership– vraiment, apprenne de ce qui s’est passé en Guinée.
Il y a quand même des contre-exemples. Le Niger et le Burkina ont réussi à organiser des élections et semblent avoir pris une voie vers une démocratisation que ces pays ne connaissaient pas auparavant.
D’accord, le Niger a organisé des élections, Issoufou est parti… C’est très bien. Je pense qu’aujourd’hui, il faut penser –que ce soit au Niger, au Mali et au Burkina Faso– à des stratégies pour aboutir à la paix. Aujourd’hui, les stratégies sécuritaires prennent le pas sur les stratégies pour aller vers la paix. Et sans la paix, il est évident que ces pays vont rester fragiles sur tous les plans ; économique, politique, sécuritaire et même démocratique.