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AP- A son arrivée à Ouagadougou, Bouba (1) a acheté des mangues. Des mois qu’il n’avait plus croqué dans un fruit. Chez lui, à Djibo, cité sahélienne à 200 km au nord de la capitale, il faut rallier les périphéries sablonneuses et déjà rurales pour voir un manguier. Ce n’est pas très loin du centre-ville, à peine 5 kilomètres, mais s’y aventurer n’est plus possible. Quant aux transporteurs qui approvisionnaient ce chef-lieu du Soum, province frontalière avec le Mali, ils ont cessé d’emprunter la N22 au départ de Ouagadougou.

Depuis le 17 février, Djibo vit sous blocus des groupes armés terroristes. Plus rien ni personne n’entre ou ne sort de la ville. La nasse s’est resserrée autour de 350 000 personnes. Parmi eux, des centaines de milliers de déplacés ayant fui les violences dans le Soum ces trois dernières années et la population hôte : environ 60 000 habitants recensés en 2019. Le havre est devenu une souricière. C’est le siège le plus long et le plus intense imposé par des groupes jihadistes apparus en 2015 au Burkina Faso.

Démonstration de force vis-à-vis des forces de défense et de sécurité (FDS), instrument de soumission des populations et d’entrave à l’aide humanitaire, le blocus participe au grignotage du territoire, dont 40% échappe aujourd’hui au contrôle de l’Etat. Du nord à l’est du pays, plusieurs villes carrefour sont enclavées, après que les habitants des localités environnantes ont été attaqués ou sommés de fuir par les jihadistes. En 2021, le Burkina Faso a subi plus d’attaques meurtrières que le Mali ou le Niger selon l’ONG Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled). A la manœuvre, une mosaïque de groupes armés où convergent jihadisme, banditisme et criminalité organisée. Ils opèrent sous la bannière du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim selon l’acronyme arabe, affilié à Al-Qaïda) ou de l’Etat islamique au Grand Sahara