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AP-La situation au Mali est toujours au cœur des discussions au niveau de la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). En effet, depuis le 9 janvier dernier, les chefs d’Etat de cet organe sous-régional ont décidé de fermer les frontières avec ce pays et de le mettre sous embargo. C’était lors d’un sommet extraordinaire relatif «à la volonté du gouvernement de transition de ne pas organiser des élections présidentielle et législatives ramenant les civils au pouvoir». Depuis, une polémique est née. Certains jugeant les sanctions prises contre le Mali trop «sévères». Des manifestations ont même été organisées pour dénoncer ces mesures. Et ce jeudi 27 janvier, la Commission de la CEDEAO a publié «une note» pour justifier les quatre raisons qui motivent lesdites sanctions pour, précise-t-elle, un retour à l’ordre constitutionnel au Mali. 
Seneweb vous livre l’intégralité du document.
«Face au non-respect, par les autorités de la transition militaire du Mali, des engagements pris vis-à-vis de la CEDEAO pour un retour à l’ordre constitutionnel dans les délais acceptés, et après plusieurs appels lancés au gouvernement de transition militaire restés sans suite, la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO a pris, en date du 9 janvier 2022, des sanctions à l’encontre du Mali, conformément aux dispositions légales et réglementaires de l’institution.
La Commission de la CEDEAO souhaite, à travers cette note, clarifier les raisons qui fondent la prise desdites sanctions et rappeler à toutes fins utiles que la CEDEAO demande seulement aux autorités de la transition militaire de permettre aux Maliens de choisir eux-mêmes leurs dirigeants à travers des élections démocratiques.
En effet, les différents sommets des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO relatifs à ce sujet ont déploré un manque de volonté politique de la part des autorités de la transition militaire ; ce manque de volonté se traduit notamment par l’absence de progrès tangibles dans la préparation des élections, en dépit de la disponibilité manifestée par la CEDEAO et l’ensemble des partenaires régionaux et internationaux à accompagner le Mali dans le cadre de ce processus de normalisation.
A- Soutien constant de la CEDEAO au Mali pour une sortie de crise
Il convient de rappeler que la CEDEAO accompagne le Mali dans un processus de sortie de crise, depuis les évènements socio-politiques consécutifs aux élections législatives d’avril 2020, qui ont été suivis par le coup d’État d’août 2020 ayant mis fin au régime du président Ibrahim Boubacar Keita.
Par ailleurs, avant le coup d’Etat d’août 2020, lors de la crise socio-politique d’avril à juin 2020, SEM Goodluck Ebele Jonathan, Médiateur de la CEDEAO pour le Mali, a rencontré, à plusieurs reprises, tous les acteurs socio-politiques, les chefs religieux et la société civile, en vue d’apaiser les tensions et trouver une solution à cette crise. Malheureusement, l’intransigeance de certains acteurs socio-politiques qui estimaient que la seule solution à la crise était la démission du président Ibrahim Boubacar Keita a exacerbé les tensions et a abouti finalement à un coup d’Etat.
Dès le coup d’Etat du 18 août 2020, des sanctions ont été imposées au Mali par la CEDEAO et des négociations ont été engagées avec les autorités militaires pour un retour à l’ordre constitutionnel. Ces négociations ont abouti, le 15 septembre 2020 à Accra, à un accord sur la mise en place d’une transition civile avec la nomination d’un président civil en la personne du président Bah N’Daw, et des élections devant se tenir le 27 février 2022, soit une transition de 18 mois.
Ainsi, à partir de septembre 2020, le processus de transition s’est déroulé normalement. Le gouvernement de transition du président Bah N’Daw a fourni un chronogramme sur la base duquel il a initié les actions visant à préparer la tenue des élections à la date convenue du 27 février 2022. Un comité de suivi local comprenant les représentations de la CEDEAO, de l’Union africaine, des Nations Unies et des ambassadeurs du Ghana et du Nigeria a été mis en place à Bamako pour accompagner localement la transition.
Malheureusement, dès la survenue du nouveau coup d’Etat le 24 mai 2021, la dynamique et les objectifs des nouvelles autorités de la transition militaire ont radicalement changé ; celles-ci ne faisant plus du respect du calendrier électoral une priorité, entraînant un ralentissement notoire de la mise en œuvre des activités devant aboutir aux élections pour une sortie de crise définitive.
Au mois d’août 2021, au regard de cette situation et face à un risque de dérapage du calendrier électoral, le médiateur de la CEDEAO pour le Mali s’est rendu à Bamako afin de discuter avec les autorités de la transition militaire d’un nouveau chronogramme électoral indiqué par lesdites autorités pour l’organisation des élections.
Ce nouveau chronogramme initialement promis pour septembre 2021, n’a finalement été communiqué à la CEDEAO que le 31 décembre 2021, après les Assises nationales, avec une demande de prorogation de la transition militaire de cinq ans. Notant que cette proposition est totalement contraire aux engagements et accords sur le sujet et en violation des dispositions légales et règlementaires ; que l’approbation d’un tel chronogramme pourrait avoir des conséquences sur la stabilité du Mali et de la région et soucieuse de trouver une solution concertée, la CEDEAO a demandé à son médiateur de retourner à Bamako le 5 janvier 2022 pour inviter les autorités militaires à revoir ce chronogramme. En retour, celles-ci ont proposé le 8 janvier 2022 d’étendre la transition militaire de quatre ans, après avoir déjà passé 18 mois au pouvoir.
En proposant d’organiser les élections en décembre 2025, les autorités de la transition ne respectent ni leurs engagements actés dans la Charte de la transition ni ceux conclus avec la CEDEAO. Au surplus, cette proposition équivaut à une durée totale de la transition de cinq ans et demi ; ce qui excède celle d’un mandat présidentiel constitutionnel normal au Mali et dans la région.
Les autorités militaires prétextent de la nécessité de mettre en œuvre des réformes pour justifier la prorogation