AP- C’est une première. La justice française a lancé fin juin une enquête pour «recel de crimes contre l’humanité» contre des multinationales du textile accusées de profiter du travail forcé de Ouïghours en Chine, a révélé jeudi Mediapart. Confiées au pôle spécialisé du tribunal de Paris dans la lutte contre les crimes contre l’humanité, les investigations ont été déclenchées après le dépôt d’une plainte par l’association anticorruption Sherpa, le collectif Ethique sur l’étiquette, l’Institut ouïghour d’Europe (IODE) et par une réfugiée ouïghoure ayant été internée dans l’un des camps de province du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine.
Quatre géants du textile sont visés : le Japonais Uniqlo, l’Espagnol Inditex, qui possède Zara, le Français SMCP, qui détient notamment Sandro, Maje et De Fursac, et le fabricant américain de chaussures de sport Sketchers. Plusieurs ONG et chercheurs alertent depuis plusieurs années sur le travail forcé dont sont victimes les Ouïghours et les autres minorités turcophones non seulement dans les champs de coton du Xinjiang, qui fournissent environ 20 % de la production mondiale, mais aussi dans des usines textiles où ils peuvent être envoyés à travers le pays.
Boycott du coton du Xinjang
Plusieurs pays, dont les Etats-Unis, évoquent un génocide mené par Pékin contre ces peuples essentiellement musulmans. Depuis 2017, selon des ONG et des chercheurs, plus d’un million de personnes ont été internées dans des centres de rééducation politique, qualifiés par le régime chinois de «centres de formation professionnelle» destinés à les éloigner de l’islamisme.
Depuis l’an dernier, plusieurs multinationales du prêt-à-porter se sont engagées à boycotter le coton du Xinjang et à ne plus recourir à des sous-traitants qui l’utilisent. Parmi elles figurent l’Américain Nike, le Suédois H & M, l’Allemand Adidas et le Japonais Uniqlo, visé par l’enquête ouverte à Paris.
Des plaintes similaires à celle qui a abouti en France ont été déposées dans d’autres pays occidentaux.